lundi, 15 juin 2009

A(H1-N1) Ou pourquoi j'ai pris mon journal en grippe.

Retour sur la grippe porcine, aviaire et mexicaine.


C'est à la une d'un web. Journal «sérieux» s'il en est. Un décès en écosse. C'est la grippe du cochon aviaire mexicain. On apprend qu'à Toulouse, l'hôpital se prépare à recevoir les enfants d'une école infectée. Une info qui ne passerait pas nécessairement en cas de méningite — autrement plus inquiétante. En Belgique, gros titres. Une hôtesse de l'air a chopé le virus. Waow! Ça, c'est des «news»! En début de journal télévisé, en plus! Je stresse : quand vais-je y passer?


On le suppose, le sujet importe au téléspectateur. Probablement plus que la promesse d'A.H.(madinedjad) d'enfoncer la pédale atomique. Certainement plus que le refus de Netanyahou d'arrêter la colonisation. Je m'y intéresse, parce que je veux savoir : moi, l'acheteur de quotidien au kiosque du coin, pour un euro et quelques, j'exige que mon journal me dise si oui ou non j'ai une chance de l'attraper et prédise si

1. je vais, oui ou non, mourir un jour?

2. je vais, oui ou non, mourir de cette cochonnerie?

Pandémie ou éternuement?
Voyons voir… il y a eu en tout, avant ce triste décès, un peu plus de 1.200 cas de grippe CVM (cochon volant mariachi) au Royaume-Uni. Ça nous donne un taux de mortalité de 0,08%. Triste, bien sûr. Mais la grippe annuelle fait 25% de décès en plus (0,1%). Quant à la grippe aviaire, je n'ai pas encore mis la main sur une réponse sûre, mais Wiki m'indique… 60% de mortalité ce qui signifierait (si l'on en croit ce chiffre que je trouve très élevé) qu'elle serait 750 fois plus mortelle que la A(H1-N1). Cela dit, une maladie trop mortelle meurt d'elle même parce que ses malades périssent avant d'avoir eu le temps de la transmettre.

En s'amusant, ce que le sujet ne permet évidemment pas, on pourrait se dire que si l'on a chaque année une chance sur mille d'attraper cette cochonne de grippe, et s'il n'y avait aucune autre cause de mortalité, on aurait quand même encore une espérance de vie de… cent ans! Je peux vivre avec un tel taux, moi. Mieux: on devrait, en fait, éradiquer toutes les autres causes de mortalité (oui, maman, j'ai arrêté de fumer!) et promouvoir A(H1-N1), au moyen d'un slogan bien percutant : A(H1-N1), la grippe qui tue encore moins que la grippe.

Bien sûr, ce dont les scientifiques ont peur, c'est que le virus ne mute avec un autre plus coriace. Ils sont là pour ça. Prévoir. Mais force est de constater que, des trois pandémies dont on a le plus parlé au cours des dix dernières années, aucune n'a réellement pris des proportions qu'on pourrait qualifier d'épouvantables. Le SRAS a fait quelque 800 victimes sur un total d'un peu moins de 9.000 personnes infectées, soit près de 10% de mortalité (cent fois plus que cette grippe-ci). L'intervention rapide des services de santé au niveau mondial a permis de l'endiguer assez rapidement. Vu la mortalité de cette saloperie-là, on comprend que la presse se fût saisie de l'affaire et on remercie l'OMS pour son action rapide et efficace.

Pour la grippe aviaire, la même OMS avait émis l'hypothèse que le virus, qui ne se transmettait jusque là que de la volaille à l'homme, pourrait muter au contact d'un autre virus et se mettre à voler d'un homme à l'autre. Si cette hypothèse a permis aux journaux télévisés de la planète de focaliser pendant des mois sur cette maladie aux perspectives hallucinantes (décès potentiel de millions d'êtres humains) elle aura finalement, selon des statistiques suisses, tué… 220 personnes. Dans le monde. Entier. On vient d'en faire le constat amer : un seul avion peut tuer autant de malheureux en quelques secondes. On ne parle pourtant pas des avions tous les jours en début de journal télévisé, pendant trois mois.

Cette nuit, j'ai rêvé…
À propos d'aviation, la télévision belge annonce pour sa part qu'une hôtesse de l'air a atterri en Belgique avec A(H1-N1) dans l'organisme. Info. Bon. J'en fais quoi, moi, de cette info ? J'évite tout contact avec les hôtesses de l'air?

La question que je me pose est en fait : sommes-nous sûr que l'argent est bien investi? Il y a des tas, des tonnes de maladies plus meurtrières que cette nouvelle grippe. Des trois maladies dont je fais état ci-dessus et qui, apparemment, ont mobilisé des énergies énormes, aucune n'a fait, jusqu'ici, plus de mille morts.

On espère donc que les investissements dans la recherche et le combat contre ces drames restent en-deçà, mais vraiment très, très, très en-deçà de ceux qui concernent les grandes maladies du siècle qui, elles, tuent en silence, et par centaine de milliers, millions et dizaines de millions. Voyons. Une seule soirée Sida par an, comparée à  des dizaines de capsules d'info centrées sur le steward qui pourrait avoir contracté A(H1-N1) parce qu'il connaît une hôtesse belge, est-ce bien raisonnable?

Parfois, je me dis qu'on devrait commencer chaque journal par le nombre de personnes dans le monde qu'on n'a pas pu guérir d'une maladie grave faute d'investissements appropriés. La grippe porcine a tué 174 personnes à ce jour. Le paludisme en tue 2.500 chaque jour depuis des décennies.

© Marcel Sel 2009. Reproduction interdite sauf autorisation écrite de l'auteur.

07:58 Publié dans Humeurs d'Ailleurs | Lien permanent | Commentaires (4) | |  Facebook |  Imprimer | | | |

Commentaires

Je comprends que tu tapes sur ce clou particulier des paniques pandémiques, mais c'est TOUTE l'info qui fonctionne en mode nawak depuis des mois.

Ouverture du JT d'RTL TVI hier soir "Tragédie à Mons, un immeuble s'effondre en plein Doudou, il y a des dizaines de victimes".
Tout ça pour en arriver, au cours du même journal, à un bilan de quelques blessés légers.

Tu veux que je te dises?
Les médias vont mal, tous.

On assiste simplement aux soubresauts d'un système d'info archaïque qui part en vrille et ne sait plus quoi inventer pour justifier son mode de fonctionnement obsolète et son rôle de plus en plus questionnable.

Écrit par : Claude | lundi, 15 juin 2009

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Tu veux que je te dises?

On écrit: "Tu veux que je te dise?".

Je lis trop de flamand, pour le moment...

Écrit par : Claude | lundi, 15 juin 2009

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Ik wou het net niet vermelden :-)

Écrit par : Marcel Sel | lundi, 15 juin 2009

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Moi je ne comprends pas comment l'OMS n'a pas déjà déclaré depuis des années le niveau 6 avec la grippe habituelle. Elle fait actuellement plus de morts partout sur la planète et pourtant ... (ironie)

Écrit par : Guillaume | mardi, 16 juin 2009

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