dimanche, 16 mai 2010
Terril on the hill (à voir absolument)
Il y a les petites maisons. Il y a le terril. Western borain. Il y a Nuage Gris, la mère, l'insoumise, venue d'une Algérie torturée. Il y a le père, mort jeune comme tous les gens de la mine, qui continue d'exister au cinéma par un de ces secrets qui font l'enfance. Il y a les trois vieilles, «le Muppet Show», l'une qui sait tout, l'autre qui comprend rien, la troisième qui boit sa vie et voit parler des cerfs. Il y a le village, un bled de par ici, aux accents de partout. Le Rital, le Boche, le Beur, le Wallon aussi. Tous ceux qui acceptent encore cette vie dégueulasse, le noir du coke, le noir de la misère, le noir du corbillard qui, pour les hommes, attend au détour de la quarantaine déjà. Il y a les enfants, dont Jamila, qui jouent au bas du terril, ces petits cow-boys du Borinage qui, pang ! pang !, s'imaginent au Montana. Non, en fait. Ils ne s'imaginent pas. C'est là qu'ils sont.
Et puis, ils deviennent grands et cherchent des horizons meilleurs. Comme Jamila Drissi, qui a fait le conservatoire. Un jour, elle a raconté son western de terril à Soufian El Boubsi. Alors, il a réécrit l'histoire. Puis, l'a rendue à Jamila. Et Jamila est arrivée sur scène pour raconter son village avec à la fois la distance que donne la réécriture et la sincérité que donne le vécu. Avec l'humour et la drôlerie des meilleurs souvenirs — on rit beaucoup, et aux éclats ! — et la douleur de chaque absence, d'autant plus émouvante qu'on les aime tout de suite, ces gens de la Cité de l'Héribus.
Elle est donc arrivée seule sur scène, Jamila, du moins, on le croyait au début de la représentation. Elle était en fait à vingt ou trente ou plus encore. Elle nous a joué tous les gens de son bled, un coron, un village western, un camp minier, avec l'accent, ou plutôt, avec leurs accents de partout, avec leurs défauts, avec un regard d'espoir, et on en sort assommé, heureux, touché, aux rires, aux larmes, parce qu'en une heure trente, on a regardé passer vingt ans d'une vie. Cité de l'Héribus. On serait passé en voiture qu'on ne se serait pas arrêté. Si seulement on avait su !
Soufian El Boubsi a écrit et mis en scène la vie d'une Algérienne inconditionnelle de Scarlett O'Hara. Jamila Drissi joue le rôle d'une fillette qui lui ressemble étrangement. Vous avez jusqu'au 22 mai pour voir ce très beau spectacle. A moins que ce ne soit pas un spectacle. C'est peut-être simplement la vie.
L'Insoumise (ou Scarlett O'Hara au pied du Terril)
Du mardi au samedi à 20h30 à l'Espace Magh jusqu'au 22 mai 2010
02 274 05 10 ou www.espacemagh.be
01:48 Publié dans Humeurs d'Ailleurs | Lien permanent | Commentaires (4) | | Facebook | Imprimer | | |
Commentaires
Joli texte!
Écrit par : Cassandre | dimanche, 16 mai 2010
Répondre à ce commentaire@Cassandre : la pièce est splendide. Mon texte n'en est que le reflet.
Écrit par : Marcel Sel | dimanche, 16 mai 2010
Répondre à ce commentairejuste une erreur sur le link:
c'est : http://www.espacemagh.be/
Écrit par : 2B | dimanche, 16 mai 2010
Répondre à ce commentaire@2B : merci. J'ai corrigé. Je ne devrais pas écrire le dimanche en milieu de nuit.
Écrit par : Marcel Sel | dimanche, 16 mai 2010
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