dimanche, 24 avril 2011

Vokation : xénophobe.

J’avais déjà écrit à quel point l’attitude du Voka envers les présidents des quatre principaux partis francophones m’avait parue grossière et arrogante lors de l’émission de la VRT De Zevende Dag (le septième jour) de la semaine passée. Ils se permettaient, sans autre forme de procès, de qualifier les politiciens wallons de n’être — je périphrase — pas en état intellectuel de gérer même une entreprise. Pour tout dire, l’offensive de charme des quatre partis francophones est tombée sur un gros os. Ils sont aller expliquer leur point de vue au Voka. Résultat, ils se sont fait traiter d'incapables, d'hystériques et pratiquement de débiles profonds à l'émission du dimanche de la semaine suivante. Vous n'avez pas encore compris, Milquet, Di Rupo, Michel et Javaux ? Quoi que vous fassiez avec ces gens-là, vous leur donnerez toujours des arguments pour mieux vous assommer. Moralité : il ne fallait pas aller au Voka. Mais si ce n'était que ça !

 

Cette semaine, le même Voka a fait pire encore. Ils ont dit que les Noirs avaient une culture du hamac, et grosso modo, aucune éthique du travail. Oups, non, ce n’est pas ce qu’ils ont dit. En fait, ils ont dit que les Arabes avaient une culture du hamac et aucune éthique de travail. Oups. I did it again. Ce n’est toujours pas ce qu’ils ont dit. Ah ! Voilà, je retombe sur l’article du Nieuwsblad. Que suis-je bête, ce n’est ni les Noirs, ni les Arabes qui ont fait l’objet de telle xénophobie, mais bien les Wallons. 

Lire la suite

15:57 Publié dans Humeurs du Nord | Lien permanent | Commentaires (167) | |  Facebook |  Imprimer | | | |

samedi, 23 avril 2011

Alea jacta est-ce ?

Et voilà. Un an que Vincent Vanslowenborne a gazouillé «Alea jacta est». Dans cinq jours, il y aura aussi un an que la Belgique vit officiellement sans gouvernement, puisque le 26 avril 2010, le roi acceptait la démission du gouvernement Leterme. Le moins qu’on puisse dire, c’est que le préavis n’est, dans leur cas, pas du tout en relation avec la durée de travail préalable de ce gouvernement : douze mois après ils sont toujours au travail, ils sont toujours payés, ils ne risquent qu’une chose, qu’un nouveau gouvernement voie le jour, et ce n’est pas demain la veille. On a une petite pensée pour tous ceux qui, n’ayant juste pas été d’une efficacité surhumaine, se sont fait remballer de leur boulot moyennant trois mois de préavis. Nos ministres démissionnaires, eux, se pavanent comme s’ils étaient les rois du monde ! Ah ! Mais voyez, nous disent-ils, même en affaires courantes, le gouvernement fonctionne ! Merveilleux mépris pour la réalité, le quotidien de chacun. Un ton plus bas, messieurs les responsables de l’échec, des élections, du marasme, du mur ! Un ton plus bas ! Car vous n’êtes pas innocents dans l’histoire. Aucun de vous.

Lire la suite

00:43 Publié dans Humeurs du Nord | Lien permanent | Commentaires (41) | |  Facebook |  Imprimer | | | |

lundi, 18 avril 2011

Une tripartite ? Dans quel film ?

Dans quelques jours, on saura qui est qui. À la fin de ce mois, la N-VA devrait logiquement se retirer des non-négociations qui durent depuis septembre de l’année passée, ou peut-être depuis juin 2007. Sauf si, comme en août, comme en septembre, comme en octobre, comme en février, l’ultimatum mène à un « bon, allez, dans l’intérêt du pays, on essaye encore un coup, mais après, c’est juré, ça ne va pas pouvoir savoir rester continuer durer permanenter. » Mais ce serait étonnant : les ténors du parti ont été jusqu’à «utiliser» un congrès du groupe européen dont ils font partie, l’ALE (associée aux Verts de Cohn-Bendit…), pour expliquer qu’ils arrivaient au bout de ce qui était possible. Alors, fin avril, on aura le patatras du badaboum. Mais, oh ! tiens ! le CD&V regimbe, rue, s’énerve. Et un certain nombre d’éditorialistes de conclure que les partis traditionnels flamands seraient en train de lâcher la N-VA. Ô joie, il y de l’espoir !

Lire la suite

23:35 Publié dans Humeurs du Nord | Lien permanent | Commentaires (96) | |  Facebook |  Imprimer | | | |

vendredi, 15 avril 2011

Tchernobyl forever

(Erratum : merci à Denis d'avoir corrigé la date de la diffusion de Tchernobyl Forever, le 26 avril et non le 29)

Prenons un peu de hauteur, mettons notre vision à "loin dans le temps". La Belgique, le gouvernement belge, ce n'est pas important en soi. C'est un peu comme l'argent. Ce n'est pas ce qu'il est qui compte, mais ce qu'il permet. Or, tout comme le flouze, sans gouvernement, nous stagnons, et l'un des pays les plus riches de la planète ne remplit pas ses fonctions internes, ni externes. Non seulement nous mettons en péril l'avenir des citoyens, mais en plus, cette stagnation ne peut que compromettre d'autres projets à plus long terme, en matière de coopération, d'intervention — ou non — dans des conflits extérieurs, en soutien aux populations opprimées.

La crise de Fukushima le montre, autant que les premières traces de plutonium au large de la… Corée du Sud, le nucléaire ne peut être une solution à long terme, et certainement pas une solution générale — tout au plus une source d'énergie d'appoint. Quoique nous fassions, la terre sera toujours plus puissante que l'homme. Un tremblement, un tsunami, et toutes les mesures de protection que nous avions prévues tombent à l'eau, sans mauvais jeu de mots. La privatisation d'une petite centaine de Fukushima à travers l'Europe est un péril de plus, où la main d'œuvre, élément crucial de ce type de technologies, est exposée à des risques invraisemblables qui ne l'incite pas à l'optimisme.

Nous devons entamer notre sortie du nucléaire. Ce n'est pas (plus) une question de prudence, c'est le seul constat intelligent auquel Fukushima nous invite. Aujourd'hui, nous ne consommons plus japonais, et qui sait quand nous le ferons à nouveau ? Une catastrophe de cette nature peut arriver en Europe, et qui sait le crash économique que cela impliquerait ? Les ravages invraisemblables d'une seule catastrophe nucléaire sont tels qu'il n'est pas possible de parier sur cette solution pour l'avenir. Au même titre qu'Einstein a supplié le gouvernement américain de ne pas utiliser la puissance nucléaire qu'il avait contribué à développer, au vu de ce qui se passe au Japon, il ferait de même pour le nucléaire énergétique aujourd'hui, je pense.

Comment ne pas nous inquiéter quand nous avons vu des responsables de l'énergie nucléaire belge ou française nous assurer que les centrales japonaises avaient subi de simples incidents au moment où il était clair que les Nippons étaient confrontés à une catastrophe de grande ampleur, dans un cadre toujours pas maîtrisé aujourd'hui, avec des implications pour l'avenir que nous ne mesurons pas ? La gravité de toute fuite est telle que les entreprises privées chargées de gérer nos centrales atomiques auront toujours tendance à minimiser les dangers et à qualifier d'incidents ce qui ne peut être vu que comme des accidents. On a vu cette propension à l'euphémisme tant à Tchernobyl (et à l'époque, on pouvait encore parler de vétusté et de mentalité plus ou moins communiste) qu'à Fukushima, dans une société moderne et démocratique. Jusque là, l'exploitant n'était pas franchement plus suspect qu'un autre, depuis, on lui attribue tous les défauts du monde. La même chose arriverait dans une centrale occidentale. Silences, non-dits, attente du dernier moment pour évacuer les gens — on parle de trois heures avant le commencement de fusion, dans un rayon de quelque 20 kilomètres. Regardez ce qu'il y a dans ce rayon à Doel, et essayez d'évacuer Anvers en 3 heures, vous m'en direz des nouvelles !

Alors, la première chose à faire, c'est de s'informer. C'est pourquoi je vous recommande de regarder l'interview d'Alain de Halleux sur Arte, et de ne pas rater la diffusion de Tchernobyl forever le 26 avril à 20h40.

Il s'agit ici d'un problème fondamental de notre société, une question, littéralement, de vie ou de mort. Il est temps que les idéologues dogmatiques cessent de prendre notre société politique en otage de leur nationalisme anachronique. Nous avons d'autres problèmes bien plus importants à régler que de savoir si le méchant francophone a opprimé le pauvre flamand ou l'inverse. Il est temps que les électeurs se réveillent et prennent parti pour des décideurs courageux ayant le regard tourné vers l'avenir, comprenant le sens de la solidarité, cherchant à établir des ponts plutôt qu'à creuser des fossés. Il y a chaque jour un combat de plus que nous perdons faute d'y prendre part.

À bon entendeur, salut.

15:48 Publié dans Humeurs d'Ailleurs | Lien permanent | Commentaires (65) | |  Facebook |  Imprimer | | | |

samedi, 09 avril 2011

Sel revoit et corrige.

Danielle Welter, Pierre Kroll et Marcel Sel seront demain dimanche 10 avril à 11h30 les invités de Revu et Corrigé, la séquence des tops et des flops de la semaine de Mise au Point, à la RTBF, à 11h30. 

Bon 300e jour sans gouvernement à tous !

12:25 Publié dans Nouvelles de Sel | Lien permanent | Commentaires (112) | |  Facebook |  Imprimer | | | |

jeudi, 07 avril 2011

Coup bas dans le débat.

Désolé, les amis, si je suis très absent en ce moment, je suis concentré jour et nuit sur mon prochain livre. Je reviens la semaine prochaine. Mais quand même une manchette : le ministre de l'Asile et de l'Immigration Melchior Wathelet (CDH) était invité à débattre au Vlaamse Debatclub Lubbeek, codirigé par le N-VA Theo Francken, et auquel devait aussi participer le Vlaams Belanger Gerolf Annemans. C'eut été la première entorse au cordon sanitaire à la francophone, où les mandataires politiques refusent tout débat avec le Vlaams Belang. Mais ouf ! On apprend qu'à la grande consternation du Vlaams Debatclub, Melchior Wathelet aurait annulé dès qu'il aurait appris qu'Annemans était également invité. Bruno Tobback (SP.a), en revanche, lui, il y va. C'est beau, la tolérance.

Bon, si quelqu'un écrit un commentaire déplacé, n'hésitez pas à m'envoyer un petit mail à marcelsel@gmail.com. 

À lundi ! 

03:54 Publié dans Rhumeurs | Lien permanent | Commentaires (39) | |  Facebook |  Imprimer | | | |

mercredi, 30 mars 2011

Le record tient toujours !

Drame ! Alors que de 8.000 à 35.000 manifestants appelaient hier à travers tout le pays (quoique) à maintenir la solidarité, une manifestation qu'on ne peut que soutenir, l'on apprend que patatras, la Belgique n'aurait pas le record du monde. Quoi ? À défaut d'être les meilleurs en quelque chose, on ne parviendrait même pas à être les pires ?

Rassurez-vous, car tout cela n'est que de la désinformation ! Voyez. Le 27 juillet 2003 ont lieu les élections cambodgiennes. Si mes informations sont bonnes, ce sont des élections non-anticipées (je n'ai pas eu le temps de vérifier jusqu'au bout). Autrement dit, jusqu'au 26 juillet 2003, le Cambodge a un gouvernement de plein exercice. Or, ce n'est pas le cas en Belgique, puisque le roi a accepté la démission du gouvernement Leterme IIbis beta4 le 27 avril 2010. Le Cambodge a signé l'accord du gouvernement le 26 juin 2004. Autrement dit, un an moins un mois moins un jour après la caducité du gouvernement précédent. Or, si je compte bien, nous avons dépassé un an moins un mois moins un jour après la caducité du nôtre. Le fait qu'on ait voté en juin n'y change rien : le gouvernement est bien en affaires courantes depuis le 27 avril. Donc, le 26 mars, nous battions le record du Cambodge. CQFD. Ce qui fout dedans. 

(merci à mon prof de math du Collège St Pierre à Jette qui, en 1971, nous a bien fait rire avec cette blague de cour d'école sur le CQFD) 

Donc, je proteste, je m'insurge, je colère, je moutarde ! La presse dit n'importe quoi ! Et là, je pose la question, j'interroge, je méfie : à qui profite cette honteuse information ? A-t-on voulu décrédibilisé le Révolution des Frites (dont on ne trouve trace sur le site du Standaard, par exemple ?) Jeté tous ces manifestants solidaires et fiers dans le voelbak avec la mayonnaise et le Pickels ? Ou est-ce un coup de Draakske, qui n'a pas vendu de ballekes ce jour-là ? Il y a complot, c'est une évidence, et je ne laisserai pas une telle chose se produire sans au moins protester, voilà , c'est fait, je lance un cri de révolte : "oh" !

Et je conclus (pour autant que je ne me sois pas trompé ci-dessus,parce qu'alors là, j'aurais vraiment l'air con) par une nouvelle devise que je propose en remplacement de "L'union fait la Force" qui ne veut plus dire grand chose : "On est les meilleurs, surtout dans le pire" dont une traduction pourrait être (on me corrigera) : "Wij zijn de beste, en nog beter in het slechtste"

15:52 Publié dans Rhumeurs | Lien permanent | Commentaires (182) | |  Facebook |  Imprimer | | | |

lundi, 28 mars 2011

Lundi Noir - Mise à jour

Erratum sur le fichier "projections sièges" précédent, j'avais commis l'effroyable erreur de ne pas revérifier les calculs de mon logiciel graphique, et les Francophones n'avaient plus que 52 sièges au lieu de 62. J'ai corrigé le graphique ainsi que les chiffres dans le texte. Avec toutes mes excuses et mes remerciements à ceux qui recomptent pour moi. 

C'est un lundi noir. Probablement. Parce que les sondages ne sont pas des élections. Mais je pars du principe qu'ils donnent une tendance. Tout ce qui suit est donc de la quasi-fiction, mais autant en tirer les conclusions comme si c'était du vrai. Tout d'abord, les partis républicains indépendantistes sont désormais majoritaires en Flandre. J'ai prolongé mon graphique de septembre, où je distingue les indépendantistes (NVA+VB+LDD), qui sont à 50% désormais. La ligne verte est celle de l'ensemble des partis qui veulent au moins une confédération (à savoir, l'association de deux pays indépendants dans le cas du CD&V). Là, on monte encore, à 66%. La ligne orange est celle des antinationalistes (Open VLD, SP.a, Groen) même s'il y a dans ces partis des gens au profil plus "flamingant", force est de constater que des messages antinationalistes clairs ont été envoyés depuis ces partis (Niet in onze naam pour Groen! et le SP.a,, déclarations de Verhofstadt, Mathias De Clercq, Ann Brusseel, Els Ampe pour l'Open VLD). L'on constate avec étonnement que ces partis remontent tout de même très légèrement. La raison en est que le CD&V perd plus de plumes que le groupe antinationaliste. Mais c'est dans le bas du tableau. Si la progression des indépendantistes n'était pas encore suffisante pour s'alarmer gravement de la situation, j'ai encore pire…

Image 191.png

L'Italie du Nord
Cette projection en sièges en cas d'élections avec des résultats identiques à ceux du sondage est un simple exercice : dans la réalité, la répartition des sièges dépend aussi du succès de chaque candidat dans son arrondissement. J'ai aussi pondéré le vote bruxellois selon un calcul savant. Il y a donc une marge d'erreur pouvant aller jusqu'à 3 sièges ; ainsi, le PP peut obtenir un total de 2% sur la Belgique, mais n'avoir aucun candidat élu. Il en va de même pour le FN. Mais nous faisons ici un exercice sur les intentions de vote, pas sur la réalité. Notez aussi que la progression en sièges notamment en Flandre ne se reflète pas de façon aussi radicale que dans les sondages : les sièges sont répartis en 88 "flamands" et 62 "francophones". Par ailleurs, un parti qui fait 33% en Flandre ne fait que 19,5 % dans le pays, ce qui s'exprime dans mon calcul par 1/5e des sièges (20%).

Regardez ce joli graphique, puis passons aux constatations. Mais commençons par dire ceci : la Belgique est désormais tombée dans le travers italien, à savoir l'éparpillement des voix sur un grand nombre de partis qui récoltent pour la plupart moins de 10% des sièges, avec deux partis principaux aux opinions absolument opposées, la N-VA et le PS. Si Bruges est la Venise du Nord, le parlement Belge serait, si on votait aujourd'hui, la version septentrionale du parlement romain ! Avec cette difficulté supplémentaire : l'opposition communautaire. Bref, c'est ingérable.

 

Image 197.png

Lire la suite

18:12 Publié dans Humeurs du Nord | Lien permanent | Commentaires (131) | |  Facebook |  Imprimer | | | |

samedi, 26 mars 2011

Le Voorpost sera entre Tubize et Flobecq (my guess)

En suivant les horaires des bus affrétés par le Voorpost pour la marche de demain, on peut penser qu'ils n'iront pas embêter les Tournaisiens, ni l'ouest du Hainaut. Le(s) bu(s) qui partent de Flandre orientale et occidentale démarrent bien plus tôt que ceux du Brabant flamand ou d'Anvers. Si le Voorpost voulait se promener à Commines, ce serait évidemment l'inverse. Tous les bus se retrouvent sur un parking à Ruisbroeck, qui donne sur la E19. C'est de là qu'ils partent en fin de matinée vers la ou les communes où ils iront marcher. Je doute qu'ils nous fassent le coup de le faire dans les communes à facilités de la Périphérie bruxelloise (ou flamande). On pourrait penser à Waterloo, mais ils y sont déjà allés par deux fois. Les promeneurs aiment changer de destination. 

C'est donc plutôt dans le Hainaut de l'Est que nos flamingants radicaux manifesteront. Le départ à Ruisbroeck, directement connecté à l'Autoroute Bruxelles/Hal/Lille qui longe commodément la "frontière linguistique" indique plutôt que les villes les plus faciles à atteindre seraient Enghien et les communes "volées" environnantes. De Tubize à Lessines, on devrait brûler. Au pire, je pense qu'ils pousseraient jusqu'à Flobecq, symbolique s'il en est puisqu'elle était bourgmestrée par le ministre-président wallon Rudy Demotte jusqu'il y a peu. Toutefois, le point de rassemblement à Ruisbroeck est alors peu pratique. Mais bien sûr, d'une troupe aussi bien organisée que le Voorpost, on peut s'attendre à tout.

Que chacun reste parfaitement zen, cette promenade ne regarde que le Voorpost et éventuellement la police. Le meilleur moyen de répondre à la provocation, c'est de ne pas y répondre. Même pas gentiment.

13:26 Publié dans Humeurs du Nord | Lien permanent | Commentaires (146) | |  Facebook |  Imprimer | | | |

jeudi, 24 mars 2011

La Belgique coulée par les affaires coulantes.

Sur Terzake, Inge Vervotte nous permet enfin de comprendre la raison d'être du gouvernement en affaires courantes et pourquoi il travaille "bien". En gros, elle lève le voile sur le mystère du "successful failed country". Le gouvernement en affaires courante a un rôle précis : il est là pour donner le temps nécessaires aux partis flamands à obtenir une grande réforme de l'État, ou plutôt, à donner vie aux résolutions votées unilatéralement par le Parlement Flamand en 1999.

En d'autres termes, deux partis néerlandophones ont pris l'État doublement en otage. D'abord, en suspendant l'arrivée d'un gouvernement "réel" à la signature préalable d'un éventuel accord. Ensuite — pour rendre cette période supportable pour le pays — en donnant à d'Yves Leterme la charge d'utiliser le concept d'affaires courantes le plus judicieusement possible pour que le temps ne soit pas un problème ; chacun sait que les réformes précédentes ont pris dix ans voire plus, cette fois, le pari est d'y arriver en cinq ou six ans, les quatre premières étant passées.

Cela explique pourquoi Jean-Luc Dehaene a annoncé que les affaires courantes pourraient encore durer 500 jours s'il le faut, une déclaration hallucinante, mais dont le sens est désormais très clair. Le CD&V n'est pas prêt à faire couler le bateau économique, mais il s'autorise à l'immobiliser pendant que les autres pays, nos amis et concurrents avancent. Les deux partis fonctionnaient jusqu'ici en symbiose : le CD&V se chargeait de verrouiller le nogov pendant que la N-VA s'assurait qu'on reste bien radical et qu'on reste bien rigide dans ses exigences face aux francophones. Chacun dans son rôle : le CD&V dans une résistance raisonnable maintient l'outil en état. La N-VA dans une résistance jusqu'au boutiste tire "les Francophones" vers le Graal flamand, un confédéralisme qui pourrait, un jour, se muter en indépendance.

C'est une adaptation géniale du concept de Bart Maddens (ne pas négocier, mais laisser la francophonie et Bruxelles se paupériser jusqu'au moment où ils demanderont grâce). Car pendant que rien ne se passe et que rien ne se décide, Bruxelles s'affaiblit, les communes à facilités se voient imposer des Lois de plus en plus rigoureuses, la Wallonie ne se refinance pas plus qu'il ne faut et cerise sur le gâteau, on avance les petits chevaux flamands dans l'administration et l'armée. Vous voulez une direction de l'armée moins flamande ? Dites oui à tout, et on pourra en parler. Vous voulez refinancer Bruxelles ? Dites oui à tout, et on pourra faire quelque chose (mais pas trop quand même). Vous voulez qu'on relâche la pression sur les communes à facilités ? Lâchez BHV une fois pour toutes et on vous donnera une cacahuète, mais ce sera bien tout. 

Ce n'est donc pas la N-VA qui bloque la Belgique, c'est encore et toujours le CD&V, mais de façon intelligente. On ne bloque pas tout. On bloque surtout Bruxelles, tout en s'assurant par une gestion minimale que la population et la performance de la région flamande ne soient pas touchées. Autrement dit, on prend le pays doublement en otage pour obtenir une révision de la Constitution qui ne peut intéresser les Francophones, surtout pas les Bruxellois. On le prend une fois en otage en conditionnant son gouvernement à l'acceptation des seules conditions imposées par 60 % de 60 % de ses habitants (les électeurs du CD&V, de la N-VA, du VB et de LDD), on le prend une seconde fois en otage en utiisant même le gouvernement en affaires courantes pour empêcher que cette suspension nationale ne soit trop nocive. Dans 200 jours, on verra ce qu'il en sera de la "résistance" francophone. Sans compter le spectre des élections, qui signifieraient probablement la fin du pays. On l'agite à la N-VA, mais sans blague, qui peut être sûr qu'une telle perspective aura une majorité au parlement, sachant qu'à peut près tous les autres partis ont dit qu'ils n'en voudraient pas ?

Alors, pourquoi cette grosse dispute aujourd'hui entre la N-VA et le CD&V, ce clash au parlement, ces cris, ces hurlements sur les bancs nationalistes, en choeur, de la N-VA et du Vlaams Belang ? Parce que Leterme dérape. Il sort trop des affaires courantes. Et surtout, il s'est mis dans la tête de faire un budget sans la N-VA. La raison est simple : il sait qu'il est impossible d'établir un budget satisfaisant à la fois le PS, le CDH et Bart De Wever. Il n'a pas le choix. Dans son rôle de garder l'outil fonctionnel, il doit garder la N-VA à l'écart. Mais De Wever ne l'admet pas. Et il peut y avoir deux raison à ça : soit il est dans sa stratégie à lui et utilise le CD&V et les affaires courantes dans le seul dessein d'aller rapidement au bout de sa logique d'indépendance. Soit, au contraire, il est toujours d'accord avec la double stratégie, mais il y a mésentente sur le point d'affaires courantes à ne pas dépasser, et il le fait savoir. D'où un clash qui ne concerne que le CD&V et la N-VA. Parce qu'il s'agit d'un désaccord sur une stratégie commune peut-être préétablie.

On notera qu'aujourd'hui, sur les bancs de la Chambre, il y avait une unanimité de discours entre le Vlaams Belang et la N-VA. Tous ensemble, contre le CD&V. Était-ce une manière pour la N-VA, qui veut la fin du cordon sanitaire, de dire à Leterme : attention, vous n'êtes pas les seuls nationalistes avec qui nous pouvons nous entendre ? Ou le Stratego groep joue-t-il aussi habilement la carte Vlaams Belang, parti mis sous contrôle de la N-VA depuis l'affaire Morel, et dont plusieurs élus locaux sont passés avec une facilité déconcertante dans le camp De Wever, avec l'aide externe de Frank Vanhecke ? On le saura plus tard, trop tard probablement.

Mais que peut-on dire aux partis francophones ? Sinon qu'ils sont en train de se faire rouler dans la farine sur toute la ligne ? Un signe : le reproche fait par les ténors N-VA est simple : en ne jouant pas le jeu comme il le faudrait, le CD&V rompt le front flamand, et donne des points aux "Francophones". Finalement, Leterme a rendu à De Wever dans De Standaard la leçon que celui-ci a voulu lui donner dans une émission lifestyle. Et ça n'a pas plu. Mais c'est un crêpage de chignon entre frères, avec le cousin Vlaams Belang brandi en réserve (très peu) potentielle. Rien de très définitif parce qu'en tout état de cause, les intérêts des deux partis sont les mêmes. Et ce ne sont pas les intérêts des Francophones.

Ce sont en définitive les petits soubresauts d'une lutte pour la disparition de la Belgique que nous connaissons. Un coup d'État lent et non-violent. Bien plus complexe et fatigant à réaliser que le même en version brutale. Rien de bien nocif. Allons, ne vous en faites pas, la Flandre avance. Et Bruxelles ? Et la Wallonie ? Elles attendent d'avoir compris que la Belgique n'est plus un pays. C'est depuis un bon moment déjà un simple outil. À destination de la Flandre. La question n'est plus de savoir si on veut sa fin, cette question est dépassée. Mais de savoir ce qu'on fait après.

Mais évidemment, je peux me tromper. Après plus de 300 jours sans gouvernement, j'en doute cependant de moins en moins.

22:09 Publié dans Humeurs du Nord | Lien permanent | Commentaires (95) | |  Facebook |  Imprimer | | | |