samedi, 10 mars 2012

Cartes sur table (suite)

Je reviens un moment sur l'article que j'avais écrit sur la carte de Bruxelles et sa réponse d'un Francophone (pour autant qu'on puisse n'être que Francophone dans la vie en Belgique). C'est au fond une histoire qui finit bien. L'auteur de la carte a en effet réagi très vite à mon billet de blog en la faisant retirer de tous les blogs qui l'avaient diffusée.
 
Quelques explications : tout d'abord, il a réalié cette carte, comme on dit, sous l'emprise de la colère suite à la carte de l'Open VLD qu'il a ressenti comme une agression. Il a ensuite diffusé sa carte de façon confidentielle, entre amis. Et il l'a envoyée à Francophonedebruxelles. Très vite, quelques «twittos» l'ont relayée pour la diffuser plus «efficacement». C'est en la voyant ainsi projetée que l'auteur s'est rendu compte qu'elle pouvait être très mal interprétée, parce que dans son esprit, elle parlait de résultats politiques, et non des habitants, qu'elle était violemment satirique et à prendre au deuxième degré, ce que l'absence de texte explicatif ne permettait pas de comprendre. 
 
C'est vrai qu'une explication aurait pu atténuer un peu la violence du propos. L'auteur me précise donc avec beaucoup de sincérité : «Ma carte n'est pas joyeuse. Elle ne montre strictement rien de positif concernant la Flandre, alors que la Flandre est un endroit magnifique. J'ai commencé à visiter cette région (j'allais dire ce pays) à l'occasion de courses à pied (…) Hasselt, Bruges, Anvers, la Côte sont autant d'endroits que j'ai trouvé superbes et où l'accueil des habitants ne m'a jamais déçu et ce bien que je ne parlais pas leur langue. Mais la Flandre est en train de changer et j'en suis mort de trouille, car elle se dirige de plus en plus vers l'extrémisme. C'est juste un constat. Je n'aime pas l'extrémisme, qu'il soit flamand, français ou polonais. (…) Ma carte de Flandre représente la Flandre de mes pires cauchemar, celle dont je redoute l'avènement. Monsieur Sel, en tant que citoyen désespéré par la situation de son pays et dont le rêve le plus cher serait de voir cette stupide frontière linguistique supprimée, le bilinguisme reconnu sur l'ensemble du territoire belge et Bruxelles appréciée à sa juste valeur (…)» Eh oui, l'erreur est humaine, et il est vrai qu'Internet permet aujourd'hui de diffuser très (trop) vite des choses qui mériteraient plus mûr réflexion. Tout est nivellé, on est tous devenus des producteurs d'informations, mais sans les gardes-fou que sont les rédacteurs en chef ou les éditeurs. Le fanzine a la même valeur éditoriale que Le Monde, et cela joue des tours à certaines personnes. Ça m'en a joué à moi-même, et j'écris professionnellement depuis 25 ans… 
 
L'auteur explique aussi que s'il n'a pas fait une carte «humaine» mais bien «politique», c'est parce qu'il ne connaît pas suffisamment la région. Il ajoute : «Je reste vexé de la carte de l'Open VLD mais je tends à être convaincu grâce à vous notamment que ma carte a sa place dans un feu. Analogie : on couche sur papier sa hargne, sa frustration, ses peurs, ses craintes. On se sent bien mieux après. On brûle ensuite le papier sans jamais le montrer à personne».
 
D'où la question : comment en sommes-nous arrivés là ?
 
J'ai toujours eu beaucoup de respect pour les gens qui sont capables de reconnaître leurs erreurs. Par expérience professionnelle, je sais que ce n'est que lorsqu'un travail est diffusé qu'on en prend toute la mesure. Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis, mais reconnaître ses propres erreurs et tenter de les réparer  requiert intelligence et ouverture, deux qualitésplutôt rares dans le domaine politique de nos jours. Mais cette mésaventure a son utilité : elle pose le constat d'une mécompréhension mutuelle qui peut entraîner des réactions extrêmes sous l'emprise de la colère, de la frustration ou de la simple impression d'avoir été méprisé.
 
L'auteur me demande aussi ce qu'il peut faire [de positif]. À ceux qui posent cette question, je répondrai comme Shalom Arshav : construire des ponts. Mais attention, il ne faut pas les bâtir sur des illusions, et encore moins sur une relation déséquilibrée. Analogie proche-orientale : ça ne sert à rien de construire avec le Likoud ou avec le Hamas. Ces gens ne sont pas intéressés par une solution satisfaisante pour l'autre. Ils ne chercheront qu'à tirer profit des ponts lancés par les bonnes volontés pour avancer dans leur propre combat, comme Bart De Wever le fait à chaque fois que Didier Reynders introduit l'une de ses conférences en Flandre ou quand Alain Destexhe lui offre une tribune libre en lui demandant de préfacer son livre sur le mouvement flamand (très intéressant malgré quelques erreurs dues au sempiternel complexe du francophone colonisateur), tribune que le César anversois n'a pas hésité à utiliser pour prôner le nationalisme identitaire en long, en large et en détail.
 
Et d'autre part, on ne construit des passerelles interculturelles et intercommunautaires qu'entre personnes de respect. Il est vain d'établir des contacts avec des gens qui méprisent ouvertement la Wallonie, Bruxelles, ou la Flandre. La première condition d'une entente mutuelle, fût-ce au niveau d'un petit groupe de gens, c'est le respect partagé, et pour commencer, le respect de soi. Il y a une différence fondamentale entre la fierté et l'arrogance. On peut être à la fois fier et modeste, fier et autocritique, fier et ouvert.

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lundi, 05 mars 2012

Bruxsells

En complément au billet précédent, et pour clarifier certains points, voici comment je vois Bruxelles.

Dans un cadre belge
C'est une ville cosmopolite. Personne ou presque ne peut se revendiquer "pur bruxellois", ce qui est une excellente chose. Il y a à Bruxelles une très forte proportion d'étrangers. Bruxelles-ville n'est pas la capitale de la Flandre (parce que située sur un autre territoire), ni des communautés flamande ou française (parce qu'inconstitutionnel), mais bien le siège de ces deux communautés qui y sont les bienvenues. Bruxelles-ville est la capitale de la Belgique, et à ce titre, les trois communautés doivent y être représentées et disposer d'un accueil correct. Aucune communauté ou région n'a droit à revendiquer le territoire de la Région Bruxelloise et seules ses instances internes sont compétentes pour décider de sa structure interne ou de son avenir.

La surreprésentation politique est un abus. Il n'est pas normal qu'un pourcentage très minoritaire de la population ait autant de voix que la majorité, quelle qu'elle soit, pour des décisions non-culturelles. Il n'est pas normal, par exemple, qu'une ministre élue par quelques milliers de personne ait un pouvoir qui dépasse celui de partis représentant une majorité de citoyens et puisse décider de l'infrastructure routière. Il n'est pas normal que des politiciens wallons et flamands décident à l'avantage de leur propre région d'infrastructures ou de politiques bruxelloises. Il est encore moins normal qu'il y ait des différences de traitement ou d'imposition ou encore d'avantages entre les uns et les autres. Je n'accepte ni l'assurance sociale communautaire flamande, ni les transports en commun semi-gratuits pour les élèves d'une "communauté" française au détriment des autres. Ce sont des pratiques d'apartheid à proscrire, a fortiori dans cette Europe-ci.

En revanche, la surreprésentation communautaire pour tout ce qui concerne la culture, l'éducation, le rayonnement de la langue néerlandaises est un devoir. Elle doit être étendue le plus intelligemment possible et le plus honnêtement possible pour que tout néerlandophone, par exemple, puisse être servi le plus souvent possible dans sa langue. Mais à ce titre, les quotas éventuels doivent tenir compte de la réalité (via des sondages ou comptages linguistiques). Il est ridicule d'exiger un bilinguisme total dans une commune où il n'y a que 2 % de néerlandophones (Watermael-Boitsfort, par exemple) et il est inadmissible de ne pas avoir un bilinguisme très large, sinon total dans une commune qui compte un quart de néerlandophones, voire plus la journée (Jette, par exemple). Les services d'urgence doivent pouvoir offrir un service trilingue correct en termes d'efficacité (français, néerlandais, anglais) — j'ai pu vérifier que c'était très généralement le cas. Je soutiendrais aussi que dans la mesure des possibilités, les hôpitaux doivent prévoir une permanence médicale généraliste en anglais et en néerlandais, au besoin par association/échange avec des hôpitaux alterlinguistes. Dans les cas où ce n'est pas possible, une permanence téléphonique doit permettre une traduction sûre, facile et gratuite. Ce sont des aspects pratiques à mettre en œuvre sur des bases pratiques et non théologiques. Il en va de même pour les services de police, mais là encore, prévoir un bilinguisme total dans une commune où il ne sera pratiquement jamais requis, et le faire au détriment d'autres connaissances n'est pas efficace, d'où la nécessité d'un recensement régulier.

Il faut aussi rendre les cartes d'identités bilingues et supprimer l'adhésion à une communauté ou une autre. Chacun doit pouvoir faire son shopping librement dans les propositions culturelles de l'une ou de l'autre, y compris dans l'administration. Idéalement, les instances culturelles devraient tendre vers un trilinguisme des services et de l'offre culturelle. Cela inclut un système éducatif bilingue ou d'immersion partielle ou totale répondant aux demandes des Bruxellois.

Enfin, il est impératif pour tous de reconnaître que Bruxelles est une ville d'histoire brabançonne, à majorité autrefois flamande, mais où le français a de tout temps été parlé par une importante minorité, et que c'est cette mixité qui en a fait la ville internationale qu'elle est aujourd'hui. Il faut reconnaître aussi que la langue véhiculaire actuelle des Bruxellois est le français, mais qu'en journée, le néerlandais revêt une importance que les chiffres de la population ne reflète pas, du fait de l'arrivée de naveteurs et parce qu'une partie importante de l'entreprise bruxelloise est au moins partiellement néerlandophone. On ne peut revendiquer la francité bruxelloise sans reconnaître l'importance économique du néerlandais, et inversement. L'anglais est désormais la seconde langue la plus utilisée professionnellement et à ce titre, ainsi que du fait qu'il est l'une des langues de travail de l'UE, il doit être promu au rang de langue régionale. Il permet aussi la communication entre non-néerlandophones et non-francophones et doit pouvoir être considéré comme un mode de communication tout aussi honorable que les langues nationales. Ce serait bien aussi de promouvoir notre troisième langue nationale, à savoir l'allemand.

Voilà en gros comment je vois un avenir équitable pour une Bruxelles dont le centre, Bruxelles-ville, est capitale de la Belgique, de la Région bruxelloise et siège de l'Union européenne.

En cas de séparation
Si la N-VA gagne les élections de 2014, la Belgique cessera d'exister. Les projets de confédération que ce parti a dans ses cartons ne peuvent convenir à Bruxelles, et reviennent en fait à provoquer la sécession. Dans ce cas, il est certain que la situation de Bruxelles fera l'objet d'un conflit. Dès à présent, il faut donc prévenir qu'il serait intolérable que Bruxelles soit enclavée dans un État flamand qui a sur elles des visées territoriales en mesure de l'amener à avoir une attitude économiquement et géostratégiquement nuisible envers le centre urbain. De ce fait, si une telle agressivité devait s'avérer durable, il y aurait lieu de revendiquer un espace minimal vital qui engloberait le tracé du Ring et des autoroutes vers le Sud (Namur, Lille, Paris), ainsi qu'un accès (partagé) à l'aéroport de Zaventem qui deviendrait binational. Toute autre solution pourrait s'avérer fatale pour l'autonomie bruxelloise et sa viabilité.

Ce type de conflit risque de créer une opposition également conflictuelle à l'intérieur de Bruxelles. Cela signifie qu'il faudrait impérativement "souder" les communautés internes avant qu'une éventuelle séparation n'ait lieu. Autrement dit, donner de sérieuses garanties à la communauté néerlandophone et à la continuité de la sur-représentation culturelle, éducative et linguistique. C'est pour ça que je n'admets pas le concept de "nation francophone", ni pour Bruxelles, ni pour Wallonie-Bruxelles (qui a du reste une minorité germanophone) et que je prône une définition de l'État non pas au moyens d'une identité linguistique, mais bien exclusivement par des valeurs démocrates.

Les partis néerlandophones admis au Parlement bruxellois devraient en revanche être nationaux, et dès lors détachés de leurs alter-egos de l'État flamand. L'impôt serait payé sur le lieu de travail, et des accords bilatéraux doivent être envisageables avec l'État flamand pour lui reverser une partie de ces impôts, à la condition qu'il respecte le droit de ses minorités (ce qui implique évidemment que Bruxelles devrait s'ériger en modèle factuel à cet égard). Bien entendu, le parlement flamand et l'administration idoine devraient quitter le nouvel État bruxellois, et un parlement culturel néerlandophone autonome le remplacerait, avec des compétences étendues. Enfin, Bruxelles devrait constitutionnellement autoriser l'entrée de l'État dans une fédération avec les anciennes régions belges, si les Bruxellois le souhaitent, mais sur base d'une égalité constitutionnelle et d'une reconnaissance de l'État bruxellois par les autres entités qui souhaiteraient s'y associer. Ainsi, la Flandre et/ou la Wallonie pourraient après une séparation décider de former une fédération (et en aucun cas une confédération : on a déjà l'Union Européenne) avec Bruxelles, traitant toutefois d'égale à égale. Aucune coopération ne serait envisageable avec des états (Flandre ou Wallonie) qui ne respecterait pas le droit des minorités historiques ou agiraient de manière hostile, économiquement ou structurellement.

Enfin, les instances communautaires représentatives des diverses communautés seraient invitées à collaborer tant au niveau de l'éducation que des autres faits culturels, et tout centre culturel, musée ou théâtre devrait prévoir une proportion d'activités en néerlandais et en anglais. L'objectif étant un échange régulier et une promotion de l'autre communauté, afin de recréer l'espace multilingue qui existait avant la création de la frontière linguistique, mais désormais avec une égalité de statut pour les deux/trois langues nationales bruxelloises. 

Ceci n'est pas un manifeste, je conçois bien que beaucoup de choses sont onbespreekbaar, mais c'est simplement ma vision de Bruxelles dans les deux potentialités, celle d'une capitale belge qui se respecte et se fait respecter, d'une part ; celle d'une Flandre autonome d'autre part, face à laquelle Bruxelles doit être non pas une zone de revanche, mais un exemple de cohabitation. À chaque Bruxsellois(se) de se prononcer sur ce papier qui veut surtout être une base d'échanges de vues.

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dimanche, 04 mars 2012

Cartes sur table

La carte de Bruxelles de l’Open VLD a fait beaucoup de bruit. Olivier Maingain a parlé d’une vision nationaliste. D’autres ont eu peur que le cosmopolitisme révélé par la carte ne servît qu’à minimiser la présence francophone. D’autres encore ont fait comme si l’Open VLD avait des intentions similaires à celles de la N-VA ou du Vlaams Belang. On a aussi regardé cette carte d’un œil très jacobin, arguant qu’elle était stigmatisante, parce qu’elle «instaurait» des communautés. Et personne ne s’est visiblement intéressé préalablement aux auteurs de la carte, ou du moins à ceux qui la signent. Ni au texte qui l’accompagne. Or, c’était par là qu’il fallait commencer. Revue et correction…

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lundi, 27 février 2012

20 petits Belangers

La N-VA a donc recruté récemment une vingtaine d’élus locaux du Vlaams Belang. Freya Van den Bossche (SP.a — socialistes flamands) s’en est émue sur Twitter. «Vingt mandataires, ça fait beaucoup». Réponse de Bart De Wever : «Mais de quoi elle se mêle ?». En effet, on se demande bien pourquoi une démocrate avérée comme Freya s’inquièterait de l’arrivée dans le plus grand parti flamand de deux dizaines d’ex-membres d’un des rares partis fascistes d’Europe qui osent commémorer publiquement des nazis tout aussi avérés. De Wever se fend aussi d’un message qui se veut rassurant : «les extrémistes de droite n’ont aucune chance [d’entrer à la N-VA]»

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samedi, 25 février 2012

L'index ? Je dis "pouce".

Jean-Sébastien Lefebvre (Euractiv) a eu la bonne idée de twitter la carte de l’évolution des salaires minimaux en Europe. Et c’est très intéressant à regarder. Car que constate-t-on ? Que le système de l’indexation en Belgique n’a absolument pas pour effet de faire croître le salaire minimum au-delà de celui de nos voisins immédiats. Ainsi, depuis 1999, l’évolution de ce salaire de base en Belgique est quasi identique à ce qu’elle est aux Pays-Bas ou en France. Elle est même très similaire à la courbe irlandaise, mais en dessous. Si l’Allemagne n’est pas reprise dans ce graphique, le salaire moyen brut mensuel qui y est pratiqué est aujourd’hui encore supérieur au nôtre (3.007 € SPA chez Merkel contre 2.784 chez nous). Le salaire horaire est toutefois très légèrement supérieur en Belgique (21,87 contre 21,23). Mais le salaire net, lui, est moins élevé chez nous, rage taxatoire aidant. Mais il y a mieux. Ou pire…

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jeudi, 16 février 2012

Saint-Pierre, l’école qu’on jette (un peu vite).

Résumé : le Sint Pieterscollege de Jette a été au centre d'une polémique sur l'interdiction du français dans la cour de récréation. Pourtant, cette école ne fait qu'adopter avec un certain retard des pratiques déjà en vigueur dans de très nombreuses écoles néerlandophones. De plus, elle va beaucoup moins loin qu'un nombre certain d'instituts du réseau flamand. Enfin, les problèmes auxquels les écoles néerlandophoens de Bruxelles doivent faire face ne sont pas immédiatement compréhensible sans une mise en contexte de leur situation très particulière. Pour autant, l'interdiction du français ou d'autres langues à la récréation n'est pas la bonne solution. Il y en a bien d'autre, et il est assez étonnant, voire inquiétant, que le corps professoral n'ait pas adopté d'autres voies moins coercitives. Plus qu'une critique (même si je ne suis pas tendre), je cherche en définitive des voies de réflexion pour des pratiques plus en phase avec le développement de nos chères têtes blondes, quelle que soit leur langue maternelle.


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La pauvre école Saint-Pierre de Jette s’est pris tout dans la tronche. Des articles dans la presse francophone, jusqu’en France et au Canada (Québec) l’ont présentée — erronément — comme le collège qui a «inventé» la punition linguistique. Pourtant, le nouveau règlement «discriminatoire» instauré par la direction de l’école néerlandophone bruxelloise n’est certainement pas le premier exemple du genre, et encore moins le «pire». Rappelons les faits. Il y a quelques jours, l’école néerlandophone primaire Sint-Pieterscollege (Jette, l’une des communes de la Région bruxelloise) adresse aux «parents et élèves» une «déclaration d’engagement» titrée «Le néerlandais est obligatoire dans notre école !» Le texte rappelle : «Vous avez choisi une école néerlandophone. Pour les enfants qui parlent une autre langue à la maison, ce n’est pas un chemin facile. Toute l’équipe scolaire veut donner aux enfants les mêmes chances de progression et trouve positif que les enfants «de langue autre» acceptent de s’exprimer [exclusivement] en néerlandais [dans l’enceinte de l’école]. Nous, l’équipe d’enseignants, constatons que les enfants parlent beaucoup français dans la cour de récréation. Nous voulons que les élèves découvrent eux-mêmes la nécessité d’utiliser le néerlandais comme langue véhiculaire [dans l’école] (…) Nous lançons donc une nouvelle politique linguistique : aux enfants qui parlent français dans la cour de récréation, nous donnons un ‘bon linguistique’. Si, au cours de la période allant du 2/2 au 30/0, un élève reçoit trois ‘bons linguistiques’, il devra se rendre à une étude linguistique qui se déroulera le mardi 26/03 de 15h15 à 17h45.» Allons bon !

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jeudi, 09 février 2012

Burqa blabla ou le jeu avec nos libertés.

Caroline Fourest est une journaliste. Elle a écrit un livre sur Tariq Ramadan et débattu avec lui dans Ce Soir ou Jamais sur France 3. Un débat disponible sur YouTube que vous devez regarder attentivement du début à la fin pour comprendre ce qu’on reproche à Caroline Fourest dans certains milieux. Mais surtout pour réaliser que du début à la fin de l’émission, Tariq Ramadan donne (sans le vouloir) raison à la journaliste, en la coupant sans arrêt, en décrédibilisant son livre à partir de détails ridicules (je sais ce que c’est…), en bottant en touche dès qu’elle met le doigt là où ça fait mal (je connais, j’ai l’habitude…), en prétendant qu’elle tronque des citations qu’elle n’a pas tronquées (on me l’a fait aussi…). Il n’a juste pas pu lui reprocher de ne pas l’avoir interviewé (tiens, ça me rappelle quelqu’un…) parce qu’elle a répondu d'emblée : quand on interviewe Le Pen pour lui demander s’il est raciste, il répond évidemment «non», et ça n’a aucun intérêt. Autant dire que cette femme me fascine…

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vendredi, 03 février 2012

Bart De Wever est-il négationniste ?

Je n'ai jamais fait mystère de mon soutien à Pierre Mertens dans l'affaire qui l'oppose à Bart De Wever. Ce dernier lui reproche en effet de l'avoir diffamé en le qualifiant de "négationiste". C'est ce mardi 7 février 2012 que la chambre du conseil se prononcera dans cette affaire. Il est très probable qu'elle se contente d'évoquer la prescription, ce qui permettrait à Bart De Wever d'une fois encore manipuler l'opinion publique en faisant usage d'un droit qu'il sait par avance tronqué. Quoi que la justice décide, il pourra tirer un profit politique de la situation, comme je le montre dans l'extrait des Secrets de Bart De Wever que je vous offre pour l'occasion, à savoir tout un chapitre (dans la suite de l'article). Au minimum, la question n'est pas tant de savoir si Bart De Wever est ou non un négationniste, mais bien si l'on a encore le droit en Belgique, à partir des propos pour le moins révisionistes qu'il a tenus, d'écrire tout haut qu'on le pense. Autrement dit, de savoir si notre pays est encore une terre de liberté où la mémoire du pire événement de tous les temps peut être défendue, ou un espace étriqué où l'homme politique peut se permettre toute fantaisie sur le sujet sans avoir à en répondre, d'une part, et en traînant ceux qui le critiquent devant une justice (devenue symbolique) d'autre part.

Dans le communiqué de presse diffusé par Pierre Mertens à l'occasion de ce procès, les défenseurs de l'écrivain s'interrogent : "Saura-t-on enfin ce que recouvre le terme de négationnisme au cœur de la loi du 23 mars 1995 tendant à réprimer la négation, la minimisation, la justification ou l’approbation du génocide commis par le régime national-socialiste allemand pendant la Seconde Guerre mondiale ? Dans l’Affaire De Wever contre Mertens, le procureur a requis de classer sans suite sur base de la courte prescription prévue par le décret de 1831 sur la presse. Dans ce cas,  Bart De Wever – qui a attaqué Pierre Mertens pour diffamation -  serait certes débouté, mais le débat sur le négationnisme de « minimisation »  porté par Pierre Mertens, n’aura pas été pleinement entendu par ses juges. Dans le climat actuel, peut-on se permettre d’enterrer cette affaire initiée par le leader nationaliste, alors qu’elle met en lumière les enjeux éthiques d’un populisme nouvelle vague qui réapparait partout en Europe, et qui développe une nouvelle version du négationnisme, fondée sur la banalisation des actes de complicité de la Shoah? C’est le mérite de Pierre Mertens, professeur de Droits de l’Homme à l’U.L.B., d’avoir osé ce débat."

 

Et de préciser que la Chambre du conseil pourrait — ou non — à la fois reconnaître la prescription, ce qui est difficilement évitable, et "ajouter des considérations sur le fond.  Comme de déclarer la plainte irrecevable parce que traiter le plaignant de “leader résolument négationniste” ainsi que l’a fait Pierre Mertens  dans son  article publié dans Le Monde en 2007, ne relève ni de la  diffamation ni de la calomnie. Dans ce cas, il faudra bien que soit acté ce fait grave : l’homme politique populiste, historien de formation, a bien nié publiquement un fait historique avéré par la commission parlementaire consacrée à la responsabilité des certaines autorités belges dans la déportation des Juifs à Anvers en 1942. L’utilisation de termes polémiques exprimant l’indignation d’un écrivain renommé ne peut justifier sa condamnation, comme le réclame l’homme politique. (…) Poser la question préjudicielle ce serait aussi rappeler que la loi doit être respectée et que le débat judiciaire est un droit. Il est trop facile de déposer plainte en justice en sachant d’avance que les juges vont acter l’inévitable prescription… et de profiter de l’effet d’annonce de la plainte pour occuper le devant de la scène médiatique. La justice ne peut être instrumentalisée." À présent, pour mieux comprendre ce dossier, voici le chapitre Le Démocrate ? des Secrets de Bart De Wever parus aux Éditions de l'Arbre en juin 2011


(©Marcel Sel et Éditions de l'Arbre, reproduction interdite de l'extrait sauf mention expresse du copyright comme ci-avant et de l'URL de ce billet).

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mercredi, 01 février 2012

Étude Mise au Point : Magda Michielsens me répond.

Suite à mon article Radio Mille Collinekes, à propos de l'étude ("étude" selon moi) de Magda Michielsens sur Mise au point, celle-ci m'a fait parvenir sa position sous forme de commentaire. Comme elle m'a — avec une certaine dérision — qualifié de "gentilhomme", je 'ai d'autre issue que de considérer son commentaire comme un droit de réponse et d'en faire un billet. Bien sûr, j'y joins aussi quelques commentaires, en italiques.)

Cher Monsieur Sel, après tous les mots gentils que vous m'avez adressés, je ne peux que vous considérer un monsieur, voir un vrai gentilhomme. Je me sens aussi flattée de voir que vous, sans doute la grande exception chez les francophones, avez pris la peine  non seulement de lire attentivement l"étude", mais en plus de lui consacrer 9 pages. Ne doutant pas de votre sincérité, je me vois quand-même obligée de relever quelques (petites) erreurs que vous avez commises (sans doute involontairement) dans votre article, par ailleurs de grande qualité. Je procède dans l'ordre de l'article.
 

 

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mercredi, 25 janvier 2012

Radio Mille Collinnekes

Synthèse : une étude publiée par un ex-professeur de l'Université d'Anvers fait en ce moment le tour des forums flamingants, avec le soutien d'un certain nombre de journaux, dont Knack (équivalent du Vif/L'Express). La chercheuse Magda Michielsens y "démontre" que Mise au Point et en particulier Pierre Kroll font partie d'une campagne de haine flamande sciemment organisée. De telles accusations auraient en temps normal requis une recherche digne de ce nom et une "étude" à la méthodologie irréprochable. Or, le travail de Mme Michielsens est en-dessous de toute norme. Son point de vue, "de sensibilité flamande" est assez étonnant : selon elle, critiquer la N-VA revient à critiquer tous les Flamands. Un tel délire pseudo-scientifique méritait une déconstruction au scalpel. La voici. Bonne lecture !


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Étude «universitaire» d’une arroseuse arrosée.

Magda Michielsens est un ancien professeur de l’université d’Anvers (notamment). Elle est spécialisée dans la condition de la femme et un peu moins dans les médias. Elle n’a a priori aucun rapport avec la N-VA. Le 18 janvier 2012, elle publiait une «étude» intitulée «Vlaanderen Scherp Gesteld» (La Flandre sous la critique), qui arrangeait pourtant bien le parti de Bart De Wever. Le sujet ? L’analyse d’une et une seule émission de débats télévisés d’une et une seule chaîne belge, la RTBF. L’émission ? Mise au Point. L’objectif ? Savoir si le programme est coupable «de présenter sciemment une chose ou une personne négativement, avec pour but d’influencer l’opinion d’autrui sur le sujet en question.» Autrement dit, de diaboliser. Magda Michielsens précise qu’elle veut savoir si la RTBF y mène : «Une forme de propagande, donc, mais dans ce cas précis, comme dans le cas de Radio-Mille-Collines [qu’elle a évoquée précédemment en parlant d’Yves Leterme], dirigée contre une (grande) communauté.» Et bien sûr, l’universitaire parvient bientôt à la conclusion que Mise au Point est bien au cœur d’une campagne de diabolisation (des Flamands) de la même nature (mais espère-t-on pas de la même intensité) que celle que la radio rwandaise avait lancée envers les «cancrelats tutsis». Elle l’avoue : elle est parvenue à cette conclusion bien avant la fin de sa «recherche». Mais il fallait s’y attendre… Parce que dans cette «étude» (universitaire ?), à peu près tout est biaisé.

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