lundi, 14 mai 2012

De Wever, l'homme qui s'évapore par tous les pores.

Résumé : Lorsque Bart De Wever semble "découvrir" que la Belgique s'évapore, il met en réalité en œuvre un concept autoréalisateur prédigéré qui cache ses véritables intentions, avec la complicité d'une partie de la presse.


Tocqueville écrivait des jeunes États-Unis : «Ce qui met en danger la société, ce n’est pas la grande corruption de quelques-uns, c’est le relâchement de tous. » Cette phrase visionnaire est fondamentale en démocratie. Notre démocratie mérite une attention toujours renouvelée, qui commence par les médias. Il n’est pas question de laisser les politiciens, les banquiers, les économistes, les syndicalistes raconter n’importe quoi. Il y a lieu de décrypter systématiquement leurs messages, et de pointer le doigt sur les idées, les concepts absurdes, liberticides, et ceux qui cachent la réelle volonté de l’émetteur. C’est particulièrement vrai pour les politiques, parce que les banquiers, les économistes, les syndicalistes, les philosophes, les commentateurs, on les subit. Les Politiciens, on les choisit.

 

Alors, cette semaine, j’ai une fois encore été sidéré par la facilité avec laquelle on a laissé Bart De Wever nous resservir que, selon lui, la Belgique allait «s’évaporer». Le premier problème est qu’en disant ça, il se pose en observateur d’un phénomène auquel il semble être étranger. Les plus optimistes diront qu’il s’agit là de wishfull thinking. D’autres affirmeront qu’il serait plutôt question de stratégie autoréalisatrice. La réalité est qu’il s’agit d’un concept soigneusement conçu pour en cacher un autre.

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jeudi, 10 mai 2012

La Peene, waar Vlamingen thuis zijn.

La semaine passée, l'Écho de la Lys a publié un article extrêmement intéressant sur la Marche de La Peene, qui commémore la "perte" d'une partie de la Flandre au profit de la France lors de la bataille de Cassel ou de La Peene en 1677, et est aujourd'hui l'une des étapes de ce que j'appellerais le "rallye flamingant" où se retrouvent des régionalistes de toute orientation, des plus sympathiques amoureux de la Flandre flamandophone et de son patrimoine aux plus encombrants nationalistes identitaires. Je vous recommande la lecture de ce billet bien documenté, qui donne une assez bonne vision de la mosaïque "mouvementflamandienne", sous le titre “L'embarrassante marche flamande". En marge de ce billet, son auteur, Stéphane Lamek, m'a interviewé… Inteview que voici. 

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vendredi, 27 avril 2012

Aujourd’hui, j’ai insulté un conducteur de bus.

Elle est black. Ado. Short à étoiles. Natte. Casquette de travers. Maquillée comme Beyonce. Visible à des kilomètres. Je marche derrière elle dans la rue. Elle était juste devant moi quand je suis allé acheter des clopes. Elle monte dans le bus 60, au coin de l’avenue Lepoutre. Quand j’arrive à hauteur du bus, le conducteur engueule la fille et la prie de descendre. Je m’arrête à hauteur de la porte ouverte, pour écouter. Parce qu'une ado m'a raconté une histoire similaire, ou une dame mûre qui avait osé manifester son mécontentement pour un retard insensé (plus de 30 minutes) avait, elle aussi été priée de descende. 


Du coup, je me demande si on est dans le même cas de figure. 


Le conducteur gueule, la fille proteste. J’ai mon abonnement, dit-elle. Vous n’avez pas dit bonjour, dit-il. Je ne repars pas tant que vous n’êtes pas descendue tonne-t-il. La fille résiste : «j’ai payé, j’ai le droit de prendre ce bus». Lui est bras croisé. «Je ne veux pas de gens comme vous dans mon bus», dit-il à la black. Elle envoie: «des gens comme nous ? C’est quoi, des gens comme nous ?» Il oblique : «des gens qui ne disent pas bonjour». Ouf. Mais c'est limite.

 

Les autres passagers sont entre le descendez mademoiselle et le mais enfin, monsieur. Le conducteur reste sans bouger, porte toujours ouverte. Une dame s’approche de lui pour lui dire qu’elle est pressée. Le conducteur : «elle n’a qu’à descendre». Tout à coup, il me voit, debout devant la porte ouverte du bus. «Qu’est-ce que vous voulez, vous ?» Je lui dis calmement que je veux comprendre. Pourquoi il immobilise une trentaine de personnes, pourquoi il met le bus en retard, pourquoi il dit à la black «les gens comme vous». Elle a payé, oui ou non ? Je demande à la black. «Évidemment, j’ai mon abonnement». Je suis avocat de trottoir. Je dis au conducteur : «bon, alors, qu’est-ce que vous attendez pour démarrer ?»  

 

— Elle n’a pas dit bonjour, monsieur, et elle n’a pas validé son abonnement .

— Monsieur, je comprends, vous faites un métier compliqué, mais si elle a son abonnement, et si elle s’excuse…

— Non, monsieur, je ne pars pas tant qu’elle n’est pas descendue.

— Dites, je vous dis que je comprends, mais là, vous prenez tout un bus en otage parce que mademoiselle a des manières qui ne vous plaisent pas. 

— Oui, et j’ai le droit !

— Donc, quand on ne vous dit pas bonjour, vous refusez les gens ? Mais c’est fou, ça, vous discriminez, en plus !

— Monsieur (là, il gueule) c’est mon bus, je fais ce que je veux !

— Écoutez, dis-je en détachant les syllabes, blanc de colère froide, Lino Ventura de quartier : vous fermez votre porte, vous faites partir le bus, avec la demoiselle, parce que sinon, je prends votre matricule et j’écris tout de suite une lettre à la direction de la STIB.

— Eh bien d’accord. Mais la prochaine fois que je vois celle-là à l’arrêt, je ne m’arrête pas !

— Mais c’est de la discrimination !  

— Le règlement m’autorise à refuser les passagers qui ne me plaisent pas.

— Ah bon. Et si moi, je suis à l’arrêt ?

— En tout cas, si je vous revois, vous ne montez pas dans mon bus.

— Je vous jure que si vous m’empêchez de prendre ce bus un jour, ça ira très loin, je lâche stupidement.

 

Mais il a cédé. Cinq minutes de perdues sur l’horaire. Les gens dans le bus commencent à râler, contre lui. Il va fermer la porte et repartir, avec la jeune fille impolie, avec la jeune fille qui fait partie «des gens comme vous». Avant qu’elle ne se ferme complètement, sa porte, je lui crie bien fort : «connard !»


Je ne pourrai peut-être plus monter dans ce bus.

 

Car désormais, je fais partie de cette horde de fous dangereux, de violents, de méchants, de salopards qui, dans cette société de jeux vidéo, de violence télévisuelle, d’individualisme forcené, insultent sans la moindre raison les gentils conducteurs de bus, toujours affables, toujours à temps, toujours formidables. Toujours dans leur droit.


Oui, aujourd’hui, j’ai insulté un conducteur de bus. 

Et je persiste et signe.

Je m’appelle Marcel Sel.

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mardi, 24 avril 2012

De la Marine en Hollande (ou la France comme Sarko la laisse.)

Il y a tout juste un an, j’écrivais dans Les Secrets de Bart De Wever «L’on doit s’inquiéter du fait qu’il aura quand même fallu trois ans pour que la dénomination du ministère [de l’Immigration et de l’Identité nationale] changeât et que l’on supprimât l’expression ‘identité nationale’ dans l’énoncé […] Ce n’est peut-être pas un hasard si cela fut fait quelques mois seulement après les élections régionales de mars 2010, où le Front national obtint des scores qu’il n’avait plus obtenus depuis belle lurette. Éric Besson et Nicolas Sarkozy avaient-ils trop dangereusement flirté avec les concepts nationalistes, incitant les électeurs attirés par ces thèmes à considérer les thèses du FN comme admissibles dès lors que l’UMP, indiscutablement libérale, les brandissait comme des thèmes républicains ? Il faut écouter Jean-Marie Le Pen lorsqu’il dit : ‘Les Français préfèrent l’original à la copie.’ Il connaît bien le sujet !»

 

Hier donc, le Front national s’offrait quelque 18 % de suffrages au premier tour des élections présidentielles…

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lundi, 16 avril 2012

Au théâtre de la Balsamine, je vous dirai mercredi ce qu'est l'argent.

Du 17 au 24 avril 2012 (à 20h30), le théâtre de la Balsamine vous propose une réponse théâtrale à la question "QU'EST-CE QUE L'ARGENT ?" dans une pièce éponyme d'Odile Vansteenwinckel & François Beukelaers. Pour répondre (ou non) à la question, les auteurs se sont basés sur un débat qui a opposé Joseph Beuys (artiste contemporain et philosophe) à des économistes allemands en 1984. Depuis s'est ajoutée une donnée supplémentaire : l'argent virtuel, celui que les banques créent quand elles vous prête, mais qui n'existe jamais concrètement. 

 

Et moi, qu'est-ce que j'ai à voir là-dedans, me direz-vous ? Eh bien, c'est simple, chaque jour, la Balsamine invite une "personnalité" un peu décalée pour mettre son grain de sel dans la pièce. J'interviendrai le 18 avril, et j'aurai carte blanche. Une sorte de crédit illimité sur le sens du dieu Money. Parmi les autres intervenants, il y aura jan Bocquoy, Jean Bofane ou encore Suzy Falk. Voici les dates :

 

   * le 17/04: Serge Goldwicht, artiste plasticien Belge (collectif manifestement)

   * le 18/04: Marcel Sel, écrivain, blogueur, chroniqueur et compositeur belge né à Bruxelles.

   * le 19/04: Jan Bucquoy, cinéaste Belge connu pour son film "Camping cosmos"

   * le 20/04: Jean Bofane, écrivain

   *le 21/04 : Suzy Falk, comédienne

   *le 23 / 04 : Laurent d'Ursel (collectif manifestement)

 

 

© Gaëtan Rusquet

 

 

Réservations

- Au 02 735 64 68

Du lundi au vendredi de 14h à 18h. En dehors de ces heures et le week-end, un répondeur prend vos réservations 24h/24

- Via notre adresse e-mail : reservation@balsamine.be

 

la Balsamine

Avenue Félix Marchal, 1

1030 Bruxelles

 

www.balsamine.be

 

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mardi, 03 avril 2012

Il semblerait qu'on en Vuye à Laporte.

C’est à chaque fois la même logique, le même modus operandi. Au point où l’on se demande si c’est calculé ou si certains journalistes réagissent systématiquement aux mêmes stimuli de la même manière. La cible ? Toujours la même : la RTBF et Le Soir. Autrement dit, deux médias truffés d’antiflamands, de méchants racistes qui sèment la haine, brisent les ponts, assassinent la Belgique. L’accusateur ? Il vient toujours de la même zone politique, la N-VA. Autrement dit, un parti ultrafrancophile, qui apporte l’amour, construit des ponts et fait tout ce qu’il peut, un peu désespérément, pour sauver le pays qu’il adore, adule, défend corps et âme — non, pas la Flandre : la Belgique. Ah ! si on avait laissé faire Bart De Wever lors des négociations, c’est sûr, notre pays aurait été sauvé. La mauvaise foi des N-VA n’a pourtant pas effleuré ces journalistes méthodiques, ultraobjectifs, sérieux, anticommunautaristes qui sont si nombreux dans les médias du Nord, oh oui, si nombreux à défendre une Belgique unitaire, solidaire, généreuse, et à refuser à tout prix de concevoir qu’il y ait la moindre différence entre un contribuable francophone et un contribuable flamand. Oh jamais, au grand jamais, aucun d’entre eux ne se permettrait de prétendre que les seconds auraient une monnaie différente, nommée «argent flamand», tant ils voient en chaque Belge un Belge comme un autre, indépendamment de la langue qu’il parle. Mais vraiment, non, jamais ! 

 

Je suis en colère, une sale colère, une colère sourde, les pires.

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dimanche, 01 avril 2012

Marcel Sel enfin au FDF ! (exclu)

Si vous ne m’avez pas vu publier d’info sur ce blog depuis quelques semaines, c’est que j’étais en pleine négociation avec plusieurs partis, dont celui d’Olivier Maingain pour les élections communales de 2012. Voilà, aujourd’hui, je peux vous l’annoncer fièrement : je serai sur la liste du FDF d’Uccle, et même — c’était l’une des pierres d’achoppement de la négo — en tête de liste ! 

 

Ça n’a pas été facile toutefois. J’avais en effet des conditions extrêmement strictes. Mais j’ai pratiquement tout obtenu. Tout d’abord, le bilinguisme de tout candidat FDF à Bruxelles sera de haut niveau. Afin d’optimiser le néerlandais de chaque membre du parti à Bruxelles, j’ai obligé mon nouveau parti à engager Dave Sinardet comme «political language trainer», afin non seulement de rendre les FDF très bilingues, mais également de leur faire intégrer dans leur pensée politique les concepts que les journalistes flamands comprennent. Ainsi, Olivier ne dira plus «euro», mais bien «vlaams geld». Étant entendu qu’il n’y a pas de «Waals geld» et qu’à Bruxelles, il n’y a pas de «geld» du tout.

 

J’ai aussi exigé (et obtenu) qu’Olivier fasse tous ses discours d’abord en néerlandais à Bruxelles et dans la périphérie, et en wallon à Charleroi. 

 

Notez bien que le FDF n’était pas seul sur la liste des partis qui étaient intéressés de me voir figurer sur leurs listes. Il y avait aussi l’Open VLD, le PS, la N-VA et le CDH. Ce dernier exigeait toutefois que je me convertisse, soit au catholicisme, ce qui était hors de question, soit à l’islam, ce qui me tentait bien, mais quand Wathelet m’a dit que je devrais alors porter le voile aux conseils communaux parce que ça attirait de «nouveaux électeurs», j’ai refusé. Le PS, dans un même souci prosélyte, m’a demandé de prendre un accent français, très populaire à Uccle Sud comme l’a révélé la carte d’Ann Brusseel (Open VLD), et de ne plus jamais dire «septante». J’aurais bien accédé à ce petit souhait apparemment innocent si, en sus, le contrat ne prévoyait de m’interdire de m’alimenter de spierings, ettekeis, ballekes à la marolienne et autres mélokos.

 

L’Open VLD était très tentant dès lors qu’il est truffé d’antinationalistes sincères, surtout à Bruxelles. Mais là, on me demandait d’aller alimenter les grévistes de la faim de l’ULB de force en soutien à la politique de Maggie «Margaret» De Block, et ça, non, vraiment, c’était au-dessus de mes forces. Restait la N-VA. Là, tout ce que je vais vous dire est ultraconfidentiel. Figurez-vous qu’ils m’avaient identifié comme «nationaliste bruxellois» et qu’ils comptaient sur moi pour lancer une N-VA bruxelloise, la N-BA (Nouvel Brrruxelloise Alliantie). Mais ils n’ont pas été au bout de leur logique, et c’est bien dommage. Ainsi, ce parti nationaliste que j’étais prêt à lancer devait à mon sens créer une véritable identité bruxelloise, à laquelle chaque Bruxellois devait adhérer. J’ai passé deux semaines à pondre la «Charte de la N-BA et du toffe Brusseleir». Un document des plus sérieux qui constatait que la plupart des chômeurs bruxellois ne parlaient pas un mot de brusseleir. Jomme, da gô ni, hein ! 

 

J’avais donc prévu des classes d’intégration où l’on enseignerait ce bel idiôme de José Géal à tous les nouveaux venus, mais aussi aux autres, d’où qu’ils viennent, Barroso en premier. Zwanzer, froucheler, schieve lavabo, wadesmadana, étaient au programme de base de ce parcours d’intégration qui me paraissait capital. Le Bruxellois n’est-il pas une langue internationale parlée tant par les Picaros que par les Syldaves ou les Borduriens ? De plus, je prévoyais de lancer une «Marcelselomzendbrief» obligeant tous les conseils communaux des communes de la «Règion van de Brusseleirs» à n’utiliser que le bruxellois dans leurs débats. Et évidemment, j’interdisais aux enfants des écoles de la ville d’encore parler une langue autre dans la cour de récréation. Et c’est là que le bât a blessé. Parce que cela signifiait que le néerlandais serait, lui aussi, interdit de récré. Et là, Bart De Wever a compris que l’identité bruxelloise risquait de devenir concurrente de l’identité flamande, et a reculé. Exit la N-BA et mon avenir nationaliste, donc. 

 

Il m’a bien proposé de lancer la N-WA (Nouvelle Wallonnienne Alliantie) mais ne connaissant pas suffisamment le wallon, j’ai dû décliner l’invitation par sens de la droiture et de l’honnêteté, un sens que vous saluerez, amis ucclois, lorsque vous voterez pour moi cet automne, et je ne doute pas que vous le ferez, tant j’ai de belles promesses en réserve : moins d’impôts, plus de services, moins d’administration, moins de fonctionnaires, plus de routes, un  climat sans inondations, un pacte de paix entre Israël et la Palestine, un président russe protchétchène et une économie en mégaboost au Congo après la réconciliation  de Kabila et Tchisekedi. Oui, tout ça, seul Marcel Sel peut vous le promettre ! Avec le FDF Uccle, le bonheur is verzekerd ! 

 

Il ne me restait donc plus qu’à dire oui au FDF, et à poser un drapeau amarante à ma fenêtre, à côté d’un drapeau européen, d’un drapeau belge, d’un drapeau bruxellois et d’un fanion ucclois.

 

Ah oui. Dernier détail. Afin de pouvoir me présenter aux élections, je dois vous révéler mon vrai nom. J’ai beaucoup hésité à le faire, mais ma réussite politique est à ce Prix. Alors, voici : je ne m’appelle pas Marcel Sel. Vous me trouverez en tête de liste du FDF sous ma véritable identité : Marcel Dezievereer.

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mercredi, 14 mars 2012

Belgique brûle-t-elle ?

Mise à jour suite à une remarque d'Alain : mon total ne faisait que 145 députés. J'ai donc remonté ses bretelles à mon tableur et revu légèrement le commentaire

Badaboum, le baromètre RTL-TVI/Le Soir est sorti, et ça fait très mal. Tout d'abord, parce que la N-VA continue tranquillement sa progression. Je l'avais prédit, en tout cas, j'avais annoncé que ce serait probable dans un premier temps. Le fait est qu'un premier ministre francophone, une hexapartite avec soutien vert extérieur, ajoutés à la nécessité de la rigueur, ont tout pour ne pas être sexy aux yeux de l'électeur — y compris en Wallonie où le PS perd quelques belles plumes. La question est : cela va-t-il perdurer ?

En tout cas, comme je le fais régulièrement, j'ai fait une projection en sièges. Elle est très hypothétique et non scientifique, parce qu'elle ne tient compte que du pourcentage des partis et de la répartition des sièges (88 néerlandophones sur 150). Mais disons que si l'on votait aujourd'hui, la Chambre pourrait ressembler au graphique ci-dessous.

Que remarquez-vous ? C'est simple : il n'y a plus qu'une famille politique qui égale la N-VA, avec 36 sièges (39 selon Fabrice Grosfiley). Les socialistes du Nord ajoutés à ceux du Sud font jeu égal. Mais les libéraux doivent se contenter de 25 strapontins, contre 24 pour les démocrates-humanisto-chrétiens.

Autre constat : la N-VA et le Vlaams-Belang (les nationalistes) obtiennent plus de 50% des sièges néerlandophones. Imaginez une telle chose au Parlement flamand… Car oui, en 2014, on élira aussi nos parlementaires régionaux. Si ces intentions de votes devaient alors se concrétiser, le roi de la Flandre s'appellerait Bart De Wever, et il n'aurait besoin que d'un seul autre parti pour obtenir une majorité. Gageons qu'il ne choisira pas le Vlaams Belang.

Autre constat, la réforme de l'État, qui requiert les deux-tiers des sièges, requiert (mais c'est pratiquement déjà le cas) l'ensemble des partis traditionnels. Il en faut en effet la bagatelle de huit, sans aucune défection ou presque, pour parvenir aux 66,666… % fatidiques. Et il devient tout bonnement impossible de concevoir un gouvernement ayant une majorité en Flandre sans y intégrer, au choix, le Vlaams Belang ou la N-VA. Si Albert II a un jour fait un cauchemar, c'est bien celui-là.

Le Vlaams Belang ne va pas bien, c'est un fait. Mais il oscille entre 10 et 12,5 % depuis les dernières élections. Contrairement à l'Open VLD, il ne semble donc plus vouloir chuter. Dans le sondage de la semaine passée (RTBF/La Libre), il reprenait même des plumes piquées à la N-VA. Ceux qui crient à hue et à dia que ce parti est fini ("grâce à Bart De Wever" — je t'en foutrai, moi, des grâce à qui !) vont peut-être un peu vite en besogne. Et par mesure de précaution, je préfère considérer que le Vlaams Belang n'est pas encore enterré. Comme je l'ai déjà dit quelques fois, il doit sa chute d'abord à la disparition de son leader historique (Karel Dillen), et ensuite à la rigidité des "Anversois" (Filip Dewinter avant tout) et aux promesses de réforme non tenues de son président, Bruno Valkeniers, cofondateur du cercle étudiant néofasciste (ou néonazi, c'est selon) NSV. Oui, le Belang a perdu de sa superbe, mais il est aussi revenu vers plus de radicalisme. Un parti noir de noir. Filip Dewinter rappelait encore ce dimanche à un journaliste de Rue89 que son parti était "plus à droite que le FN (français)". C'est-à-dire à la droite de l'extrême droite.

Et même si le VB baissait encore, c'est au profit d'un parti tout aussi radical (belgiquement parlant) qui, à sa différence, a non seulement la capacité de se trouver au pouvoir, mais y est déjà — au gouvernement flamand, et dans un certain nombre de communes. Quant au Parlement belge, les gens de Bart occupent le terrain quasi quotidiennement. On se demande même qui est notre premier ministre, d'Elio di Rupo ou de Bart De Wever, quand on regarde le nombre de passages de l'un et de l'autre à la télévision, particulièrement en Flandre. 

À l'arrivée, la démocratie belge ressemble aujourd'hui à ce qu'était la démocratie italienne dans ses pires moments : elle est vaporisée façon puzzle. Les partis traditionnels du Nord ne parviennent même plus à faire, ensemble, jeu égal avec les nationalistes. Même la N-VA, seule, ne peut rien avec 36 sièges. Et en face, seule une tripartite traditionnelle serait encore en mesure de former un gouverment. C'est déjà le cas, me direz-vous ? Oui, mais avec une N-VA aussi dominante, et après 4 ans de gouvernements sans majorité en Flandre (6 en 2014), je pense qu'on peut exclure un accord du type de celui qu'Elio a signé. Et fin du fin, si même la N-VA n'est toujours pas maîtresse du jeu, la vaporisation politique lui profite, puisque son Credo, c'est que la démocratie belge est une hérésie. Et côté flamand, elle est tout simplement in-con-tour-nable. Bref, un tel parlement pourrait bien être notre dernier.

Une rumeur veut d'ailleurs que les Wallons n'étaient pas dupes au moment de s'engager dans le gouvernement Di Rupo. Et qu'ils n'y montaient qu'ayant à l'esprit de retarder tant que faire se pouvait l'inévitable: la scission du pays. Au vu de ce graphique, et pour autant qu'il se concrétise, ils avaient raison, tout simplement. Une chose est certaine : si ce scénario devait prendre vie, la seule chose sage qu'il nous resterait à faire serait de gérer la scission. Mais tout n'est pas joué. Nous avons un gouvernement. Il lui reste deux ans et des poussières pour inverser la tendance. Il n'a pratiquement aucun atout dans sa manche. Pire : il doit se faire détester pour maintenir le pays à flot. Il arrive dans ce bas monde que le courage et l'audace la plus folle payent. Mais de vous à moi, je n'y mettrais pas ma main au feu : il se pourrait qu'un jour prochain, dans deux ans à peine, cette actualité devienne brûlante. 


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samedi, 10 mars 2012

Cartes sur table (suite)

Je reviens un moment sur l'article que j'avais écrit sur la carte de Bruxelles et sa réponse d'un Francophone (pour autant qu'on puisse n'être que Francophone dans la vie en Belgique). C'est au fond une histoire qui finit bien. L'auteur de la carte a en effet réagi très vite à mon billet de blog en la faisant retirer de tous les blogs qui l'avaient diffusée.
 
Quelques explications : tout d'abord, il a réalié cette carte, comme on dit, sous l'emprise de la colère suite à la carte de l'Open VLD qu'il a ressenti comme une agression. Il a ensuite diffusé sa carte de façon confidentielle, entre amis. Et il l'a envoyée à Francophonedebruxelles. Très vite, quelques «twittos» l'ont relayée pour la diffuser plus «efficacement». C'est en la voyant ainsi projetée que l'auteur s'est rendu compte qu'elle pouvait être très mal interprétée, parce que dans son esprit, elle parlait de résultats politiques, et non des habitants, qu'elle était violemment satirique et à prendre au deuxième degré, ce que l'absence de texte explicatif ne permettait pas de comprendre. 
 
C'est vrai qu'une explication aurait pu atténuer un peu la violence du propos. L'auteur me précise donc avec beaucoup de sincérité : «Ma carte n'est pas joyeuse. Elle ne montre strictement rien de positif concernant la Flandre, alors que la Flandre est un endroit magnifique. J'ai commencé à visiter cette région (j'allais dire ce pays) à l'occasion de courses à pied (…) Hasselt, Bruges, Anvers, la Côte sont autant d'endroits que j'ai trouvé superbes et où l'accueil des habitants ne m'a jamais déçu et ce bien que je ne parlais pas leur langue. Mais la Flandre est en train de changer et j'en suis mort de trouille, car elle se dirige de plus en plus vers l'extrémisme. C'est juste un constat. Je n'aime pas l'extrémisme, qu'il soit flamand, français ou polonais. (…) Ma carte de Flandre représente la Flandre de mes pires cauchemar, celle dont je redoute l'avènement. Monsieur Sel, en tant que citoyen désespéré par la situation de son pays et dont le rêve le plus cher serait de voir cette stupide frontière linguistique supprimée, le bilinguisme reconnu sur l'ensemble du territoire belge et Bruxelles appréciée à sa juste valeur (…)» Eh oui, l'erreur est humaine, et il est vrai qu'Internet permet aujourd'hui de diffuser très (trop) vite des choses qui mériteraient plus mûr réflexion. Tout est nivellé, on est tous devenus des producteurs d'informations, mais sans les gardes-fou que sont les rédacteurs en chef ou les éditeurs. Le fanzine a la même valeur éditoriale que Le Monde, et cela joue des tours à certaines personnes. Ça m'en a joué à moi-même, et j'écris professionnellement depuis 25 ans… 
 
L'auteur explique aussi que s'il n'a pas fait une carte «humaine» mais bien «politique», c'est parce qu'il ne connaît pas suffisamment la région. Il ajoute : «Je reste vexé de la carte de l'Open VLD mais je tends à être convaincu grâce à vous notamment que ma carte a sa place dans un feu. Analogie : on couche sur papier sa hargne, sa frustration, ses peurs, ses craintes. On se sent bien mieux après. On brûle ensuite le papier sans jamais le montrer à personne».
 
D'où la question : comment en sommes-nous arrivés là ?
 
J'ai toujours eu beaucoup de respect pour les gens qui sont capables de reconnaître leurs erreurs. Par expérience professionnelle, je sais que ce n'est que lorsqu'un travail est diffusé qu'on en prend toute la mesure. Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis, mais reconnaître ses propres erreurs et tenter de les réparer  requiert intelligence et ouverture, deux qualitésplutôt rares dans le domaine politique de nos jours. Mais cette mésaventure a son utilité : elle pose le constat d'une mécompréhension mutuelle qui peut entraîner des réactions extrêmes sous l'emprise de la colère, de la frustration ou de la simple impression d'avoir été méprisé.
 
L'auteur me demande aussi ce qu'il peut faire [de positif]. À ceux qui posent cette question, je répondrai comme Shalom Arshav : construire des ponts. Mais attention, il ne faut pas les bâtir sur des illusions, et encore moins sur une relation déséquilibrée. Analogie proche-orientale : ça ne sert à rien de construire avec le Likoud ou avec le Hamas. Ces gens ne sont pas intéressés par une solution satisfaisante pour l'autre. Ils ne chercheront qu'à tirer profit des ponts lancés par les bonnes volontés pour avancer dans leur propre combat, comme Bart De Wever le fait à chaque fois que Didier Reynders introduit l'une de ses conférences en Flandre ou quand Alain Destexhe lui offre une tribune libre en lui demandant de préfacer son livre sur le mouvement flamand (très intéressant malgré quelques erreurs dues au sempiternel complexe du francophone colonisateur), tribune que le César anversois n'a pas hésité à utiliser pour prôner le nationalisme identitaire en long, en large et en détail.
 
Et d'autre part, on ne construit des passerelles interculturelles et intercommunautaires qu'entre personnes de respect. Il est vain d'établir des contacts avec des gens qui méprisent ouvertement la Wallonie, Bruxelles, ou la Flandre. La première condition d'une entente mutuelle, fût-ce au niveau d'un petit groupe de gens, c'est le respect partagé, et pour commencer, le respect de soi. Il y a une différence fondamentale entre la fierté et l'arrogance. On peut être à la fois fier et modeste, fier et autocritique, fier et ouvert.

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jeudi, 08 mars 2012

Mise à jour : Bruxelles nie avoir autorisé une manifestation néo-nazie

Mise à jour : Freddy Thielemans nie avoir autorisé la manif de Nation.

Le mouvement Nation, dont le drapeau arbore fièrement les couleurs du drapeau nazi (noir, rouge, blanc) organise ce 11 mars à Bruxelles une manifestation autorisée selon eux par la ville (voir plus bas). La conférence de presse que l'on peut voir ici ne laisse aucun doute quant à leur idéologie. Outre le président élu du mouvement Nation qui se dit "identitaire-solidariste", comme la NSV, par exemple, étaient présents à la conférence deux membres dirigeants de la Vlaamse Huis (maison flamande) de Lille ainsi que le militant d'extrême droite français Serge Ayoub. Ce dernier se présente comme le représentant d'un mouvement socialiste et nationaliste. On peut inverser. Nationaliste et socialiste. C'est lui qui le dit, hein, je ne fais que répéter. Ayoub se dit aussi antipartis et partisan d'une révolution solidariste (comme Joris Van Severen du Verdinaso, inventeur du terme "solidariste" et cher au Voorpost et au Vlaams Belang, par exemple). Antidémocrates, anticapitalistes, islamophobes, anti-américains, ils comptent commémorer l'attentat terroriste de Madrid, mais aussi tous les autres "terrorismes". Celui de Wall Street, des journalistes, du système, de la démocratie que nous connaissons, et du capitalisme.

Il s'agit en réalité d'une manifestation d'extrême droite paneuropéenne à laquelle participeront pas mal de Français, notamment, ainsi que desEspagnols. On se demande, après le geste d'Olivier Deleuze qui a quitté le plateau de Reyers Laat pour ne pas se retrouver à table avec un mandataire du Vlaams Belang, après l'interdiction d'une manifestation anti-islamique à laquelle participaient notamment Filip Dewinter et Frank Vanhecke (du parti précédemment nommé), pourquoi Bruxelles autorise tout à coup une manifestation aussi évidemment radicale, extrèmedroitiste, et pour tout dire néonazie. Incohérence ? Hésitations ? Ou simplement bêtise ? 

Le mouvement Nation a été créé par l'ex-bras droit de Léon Degrelle. En Flandre comme en Wallonie, à Bruxelles comme en France, il y a des héritages qui perdurent. Mais au cœur de l'Europe post-nationaliste qu'a si justement défendu Guy Verhofstadt hier sur BelRTL, une telle manifestation a tout, sauf sa place.

MISE A JOUR : Dénégation de la ville de Bruxelles
Dans un mail, Freddy Thielemans, bourgmestre de Bruxelles-ville, «tient à vous préciser qu’en aucun cas [il n’a] autorisé une manifestation du mouvement Nation ce dimanche, et que telle n’est pas [son] intention.» Dont acte qui nous rassure. Mais dans ce cas, on se demande si Nation a menti ou si le bourgmestre a changé d'avis entretemps.

18:14 Publié dans Humeurs d'Ailleurs | Lien permanent | Commentaires (23) | |  Facebook |  Imprimer | | | |